CAPITULATION ADRESSÉE PAR LE COMTE D’ALCAUDÈTE AU ROI DE TLEMCEN POUR TRAITER DE LA PAIX QUE CE PRINCE AVAIT DEMANDÉ A CONCLURE (Partie 1)
13 Septembre 1535
Moi, Moulay Mohamed, roi de Tlemcen, Je dis, qu’en témoignage de ma ferme volonté d’être le serviteur,l’ami, l’allié et le tributaire du seigneur empereur Don Carlos, roi d’Espagne, si Sa Majesté veut bien me prendre sous sa protection, je promets et m’oblige de faire tout ce qui est contenu dans les chapitres suivants, suppliant Sa Majesté de vouloir bien m’accorder les choses que je lui demande pour l’avantage de ma personne et de mon royaume, et cela sans dommage ni préjudice pour les siens.
Premièrement, je déclare que je suis l’ami, l’allié confédéré et le tributaire de Sa Majesté. Je promets d’être l’ami de ses amis et l’ennemi de ses ennemis, et de m’opposer au passage, par mon royaume, de tous Maures ou Chrétiens qui seraient en guerre avec l’empereur ou avec ses sujets ou vassaux. Si Sa Majesté vient en personne dans le royaume de Tlemcen pour guerroyer contre les autres rois du pays, je m’engage à l’accompagner partout où Elle ira, avec toutes les forces dont je pourrai disposer; mais si Sa Majesté ne vient pas elle-même et envoie seulement une armée avec le capitaine-général d’Oran, je serai dispensé de servir personnellement el je pourrai me faire remplacer par un de uns principaux officiers, lequel devra faire tout ce qu’ordonnera le capitaine général de Sa Majesté. Par réciprocité, l’empereur devra, avec les troupes qui tiendront garnison dans ses places frontières, m’aider et secourir antre quiconque voudrait me faire la guerre ou me causer du dommage. Si Sa Majesté vient en personne dans le royaume de Tlemcen ou si elle y envoie une armée, je m’engage, dans l’un et l’autre cas, à fournir les vivres et les bêtes de somme nécessaires, au juste prix de leur valeur.
Je dis et je promets que je rendrai et je ferai conduire sains et saufs, dans la ville d’Oran, huit jours après la conclusion de la paix tous les Chrétiens prisonniers désignés dans un mémoire que m’a adressé le comte d’Alcaudète, lesquels se trouvent actuellement dans le royaume et la ville de Tlemcen.Je ne recevrai dans mon royaume ni Barberousse ni aucun corsaire turc, non-seulement parce qu’ils sont les tyrans et les ennemis de tout le monde, Chrétiens ou Maures, mais aussi et surtout parce qu’ils sont hostiles à Sa Majesté. S’il arrive que, par ruse ou autrement, Barberousse s’introduise dans le royaume, je ferai tout mon possible pour m’emparer de lui, et, si je réussis à le prendre, je le livrerai au capitaine-général de Sa Majesté à Oran. Je défendrai à toute personne de mon royaume. Arabe ou Zenète, de faire la guerre ou de causer du dommage aux villes d’Oran et de Mers el-Kebir et à leurs habitants, Maures ou Juifs, ainsi qu’aux Arabes qui vivent dans la montagne, pendant tout le temps que devra durer la paix. Quiconque contreviendra à cet ordre sera châtié sévèrement.
Je donnerai des ordres pour que tout le commerce de royaume passe par la ville d’Oran, et je ne laisserai pas charger ou décharger des marchandises sur d’autres points du littoral, à moins que Sa Majesté n’y consente. De son côté, l’empereur me permettra d’avoir, dans la dite ville d’Oran, un ou plusieurs almo xarifer, receveurs et fermiers, comme il me conviendra, pour le recouvrement des droits qui m’appartiennent tant à l’entrée qu’à la sortie des marchandises. Ces agents n’auront rien à percevoir sur les approvisionnements destinés à la ville d’Oran, excepté sur les dattes, lesquelles sont considérées comme marchandise. Ces dispositions sont applicables, le cas échéant, aux villes de Mostaganem et de Mazagran. Les Maures, Arabes ou Zénètes et les Juifs qui habitent ou habiteront les territoires d’Oran et de Mers-el-Kebir, ou tout autre endroit appartenant à Sa Majesté, lui paieront les mêmes droits que s’ils étaient ses sujets, pour toutes les marchandises qu’ils exporteront du royaume de Tlemcen ou y introduiront, ainsi que le font les autres Maures qui sont mes vassaux.
Les Maures et les Juifs, habitants de Tlemcen ou de toute autre ville du royaume, pourront venir à Oran et résider dans la dite ville ou sou territoire ou dans tout autre lieu appartenant à Sa Majesté, librement, pacifiquement et sans empêchement aucun, moyennant la permission de Sa Majesté ou du capitaine-général. il en sera de même pour les habitants d’Oran et de Mers-el-Kebir qui voudront venir ou s’établir à Tlemcen avec ma permission.
Si quelques Arabes ou Maures de la montagne de Guiza, de Zafina, de Canastel ou de Benarian, lesquels sont obligés de payer tribut à Sa Majesté, à titre de vasselage, viennent, en vue de s’en dispenser, pendant le temps de la paix, à se déclarer rebelles ou à s’éloigner pour cette cause ou pour toute autre relative au service de Sa Majesté et à celui de la ville d’Oran, il m’en sera donné avis immédiatement, et je devrai faire tout ce que je pourrai pour remédier au mal et châtier les délinquants. Tous les Arabes du royaume, cheiks ou autres, seront tenus d’accepter les conditions du présent traité de paix, dans le délai de trente jours. Ceux qui s’y refuseront, seront considérés comme étant hostiles à Sa Majesté et pourront être partout poursuivis comme tels, — même dans les villages de la banlieue d’Oran et quoique munis d’un sauf-conduit, à moins qu’ils ne fasse partie d’une caravane, — sans que pour cela la paix soit rompue.
Sa Majesté prendra sous sa protection les Almoxarifes, receveurs, inspecteurs des poids et mesures, gardes, ou tous autres qui auront été désignés par moi pour recouvrer dans la ville d’Oran les droits qui m’appartiennent. Nul ne pourra percevoir les dits droits à leur place. Je me réserve la faculté de disposer de ces agents, comme je l’entendrai, et de les révoquer, le tout sans empêchement de la part du capitaine général d’Oran qui devra au contraire leur prêter son assistance, lorsqu’ils la réclameront. Sa Majesté devra également assigner un local à ses mêmes agents dans la douane publique et permettre que ceux qui frauderont les droits soient punis et châtiés, quand bien même ils seraient ses sujets. Toutes les marchandises de contrebande qui seront saisies, appartiendront aux dits almoxarifes et receveurs, et les contestations qui s’élèveront au sujet des susdites dispositions, devront être résolues en première et seconde instance dans la ville d’Oran et devant le Conseiller de la cour des comptes.
Les marchands Maures, Juifs ou autres, qui viendront commercer dans la ville d’Oran, en caravane ou isolément, ainsi que les marchandises qu’ils introduiront dans la ville ou qu’ils exporteront, si elles proviennent du royaume de Tlemsên ou si elles y vont, ne pourront être ni retenues ni saisies pour les dettes que j’aurais contractées ou que je contracterais envers Sa Majesté, à moins que ce ne soit pour sommes dues aux almoxarifes ou receveurs. Les dits Maures, Juifs et autres, pourront trafiquer à Oran, venir et s’en retourner en toute sécurité, soit par mer, soit par terre, sans qu’il leur soit fait aucun tort, offense ou injustice. Quiconque les maltraitera ou leur causera du dommage sera puni comme s’il eût agi contre un chrétien sujet de Sa Majesté, et châtié de la même manière qu’il le serait en Castille.
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