L'ÉVOLUTION DU TLEMCENI
Tlemcen apparaît comme une entité : elle n'a pas son pareil en Algérie. Si l'on veut trouver, dans l'Afrique du Nord, un élément comparable, il faut penser peut être à Fès mais Tlemcen a conservé l'allure d'une métropole régionale musulmane. Tlemcen était caractérisée par l'existence d'une masse de petits gens, retenus par le paupérisme, dans leurs traditions ancestrales, notamment chez les ouvriers et les paysans. À côté d'eux, "des Tlemcenis" enrichis par l'artisanat, le commerce et la culture, instruits dans les écoles et les universités, représentent une élite urbaine. Ils joignent alors, à leurs vieilles qualités ancestrales, le goût de la politesse et de la culture intellectuelle. Ils aspirent au confort urbain, au luxe vestimentaire, aux droits politiques, mais restent, en général, très attachés à leur religion.
Les Tlemcéni ont toujours eu un penchant pour la vie intellectuelle et les professions libérales. Il y a, à Tlemcen, ce qui n'existe pas aussi nettement ailleurs en Algérie une authentique bourgeoisie musulmane, reposant sur la fortune autant que sur le savoir. Parmi eux, on rencontrait au milieu du siècle dernier (statistiques 1954) : un pharmacien sur quatre, un médecin sur cinq, un dentiste sur six, deux sages femmes sur trois, un avocat sur sept, clercs de notaires et d'avocats, un fonctionnaire sur quatre, professeurs, avoués, industriels, commerçants, primeuristes. Un noyau de Tlemcenis a quitté la campagne pour la ville, non seulement des petits gens, mais des fils de petits fonctionnaires et de gros propriétaires fonciers.
Enrichis, ils ne se contentent plus de la traditionnelle maison musulmane andalouse, composée de pièces indépendantes, entourant un patio central. La nouvelle bourgeoisie lui préfère la maison européenne, son luxe et son confort, même son plan. Cette évolution générale est en liaison avec l'amélioration du niveau de vie, l'enrichissement, la scolarisation, la recherche des positions sociales. Une nouvelle société s'élabore, se dégage de la masse et a l'impression d'égaler les classes dirigeantes européennes. On ne peut ignorer son existence ni négliger son importance numérique et sociale, ni ses aspirations politiques.
Aujourd'hui, Tlemcen court pour retrouver son identité, ce qu'elle était pendant les monarques Zianides: une ville d'activité artisanale et commerciale, centre intellectuel, cité religieuse, ville d'art et de tourisme, attirante, à la fois par les témoins de son passé prestigieux et par le confort de sa vie moderne.
Photo: Première Famille de Tlemcen photographiée ca 1856. D'après les informations, le photographe a payé le prix d'un bourricot pour pouvoir capturer cette photo.

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