samedi 27 juin 2015

LE COMPTOIRE D'UN CAFÉ EST LE PARLEMENT DU PEUPLE...LE CAFÉ MAURE
II est pas de lieu public plus massivement présent en Algérie que le café autrefois appelé le café Maure. Biensure, l'autre lieu est le Hammam , mais ce dernier a beaucoup perdu de terrain contrairement au café qui ne cesse d'ordonner et de contrôler la vie sociale de beaucoup d'entre nous. Il est vrai que le café Maure est bien organisé tout autant que la prière, ou le marché ou le transport, un lieu social et d'échange dynamique autour duquel s'organise la vie des individus. Ce rôle pivot que joue le café dans la sociabilité de la société algérienne s'accompagne de celui d'intermédiaire entre les personnes pour conclure des transactions, négocier des ventes, effectuer des embauches et des recrutements...ou simplement pour tuer le temps.
Une petite parenthèse sur le mot "Maure", à l'origine le terme est là pour désigner les habitants de l'ancienne province romaine de Mauritanie (Afrique du nord); mais avec la Reconquista Espagnole contre les musulmans andalous et les conversions en masse par la force des musulmans et l'exode de cette population le mot a fini par prendre tout autre dimension. On passe du More ou Morisque vers le Maure, il ne s'agit plus à identifier la population nord-africaine mais incluant aussi celle du moyen orient Syriens, Libanais, Irakiens...à savoir tous les musulmans dans cette bataille qui oppose Islam et Chrétienté soutenu (Islam) par le puissant Califa Ottoman.
Bref, l'entrée en scène des frères Barberousse en Méditerranée a sans doute contribué à nourrir l'appétit gustatif des Algériens et là encore on assite à un combat entre le thé et le café et le Moka Yéménite et finalement qu'à partir du règne du grand Souliman El Canouni (Soliman le Magnifique) que "Le cahoua" était devenu "cahvé" et a su graduellement s'imposer pour finir par se forger définitivement. On se bouscule devant les cafés Maures pour déguster le mystique café Turc resérvé exclusivement aux hommes.
En Algérie, malgré la fin des Turcs en 1830 et l'effacement des Janissaires et des Kouloughlis, le café demeure bien et a réussi à survire dans un nouveau paysage, un milieu qui a été totalement boulversé avec l'arrivée des européens sur les côtes Algériennes. "...c'est leur coutume écrivent-ils à propos des Turcs de s'assembler dès le matin dans les grandes rues où il y a des marchands et dans les places publiques où se tiennent les bazars ou les marchés, Là sur le bord des boutiques ils entretiennent discourir et prendre dans de petites écuelles de porcelaine du café et de l'eau de vie le café est une manière de breuvage noir comme de l'encre qui leur semble fort sain et qui dessèche grandement Ils le boivent peu à peu à plusieurs reprises et emploient à ce bel exercice deux ou trois heures par jour dont le reste se passe prendre du tabac en fumée à quoi ils se plaisent fort ils ne assemblent jamais en aucun logis on ne leur en apporte aussitôt..."
Le café maure reste un trait typique de la vie citadine, même après 1830. A Tlemcen et à Alger il a marqué la topographie de ces villes, localisé et niché dans épaisseur des murs antiques. Et sa fréquentation n'a rien à voir avec l'organisation citadine fondée sur des critères ethno-communautaires, peut être avec le rang et le statut social mais rien ne permet de conclure exclusion des "Berranis" et des ruraux ou leur séparation drastique avec les "Hadris"; de toutes les façons, à chaque fois que la vie de café est associée à un nom de groupe ou de métier les faits nous renvoient au Turc ou au Maure subsidiairement au kouloughii ou au juif...
Aujourd'hui, le café Maure est présent plus que jamais, il s'est métamorphosé et il a acquis une nouvelle universalité avec les déplacements démographiques et géographiques. On ne sert plus que le café, on y trouve aussi du thé la menthe et les beignets du Sfendj, du M'bassess, des gateaux traditionel aux côtés de la patisserie européenne. Il n'est plus question de Chicha comme au début du XXème siècle, c'est plutôt des cigarettes classiques (Bien que la chicha a totalement disparu pendant des années des tables de cafés, on assiste aujourd'hui à son timide come-back dans des lieux spécialisés). Quelques jeux de café résistent à cette modernisation, le domino ("Dimino"), le jeu de Dames ("Damma") ou encore le jeu de carte , "la Ronda" et "le Rami" pendant le mois sacré du Ramdan probablement. Le mot "cahwadji", lui aussi n'est plus, on ne sait plus comment appeler celui qui sait bien dosé la café!!! "Mohand, Mohamed, l'artiste...Le serveur lui aussi est une victime..." Et la fonction de "Mézouar", ce fonctionnaire de l'administration fiscale n'a plus besoin de rendre visite aux cafés pour percevoir les taxes, tout se fait automatiquement, plus ou moins.
Bref, une chose est sure le café fait désormais partie du paysage social, et comme a dit l'Emir Abdel Kader: "Le café est l'or de l'homme de la rue et, comme l'or, il apporte à tous un sentiment de luxe et de noblesse"

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