dimanche 25 janvier 2015

LA GUERRE DES CHIFFRES, COMBIEN DE MUSULMANS ONT ÉTÉ EXPULSÉS DE GRENADE?
Depuis plusieurs années, il a été beaucoup écrit sur les musulmans andalous. De nombreux historiens espagnols et hispanisants se sont penchés sur le problème capital de l'histoire de la péninsule au XVIe siècle, l'expulsion des musulmans du royaume de Grenade. Avec la multiplication de ces travaux, peut-être pourra-t-on, un jour prochain, envisager une synthèse sur "ces Morisques"? Pas sûr, il serait biaisé d'établir un bilan générale ciblé sur cette problématique. Cependant, et comme il a été déjà tenté, d'essayer d'organiser soit une vision d'ensemble "nouvelle", soit une étude approfondie sur "une région précise".Les estimations les plus fantaisistes avaient pu être avancées quant au nombre de Morisques expulsés du royaume de Grenade entre 1569 et 1571 a été évalué à près de 60 000 personnes. Le problème semblait résolu. Cependant, plusieurs historiens familiers de l'histoire du royaume de Grenade persistaient à penser que le chiffre réel était plus élevé. Il a été proposé celui de 70 000 à 80 000.
Il faut préciser ici que ces calculs ont été faits à partir des données fournies par les villes d'accueil des Morisques expulsés. Celles-ci sont hétérogènes en ce qui concerne le nombre d'individus décédés avant le recensement de décembre 1570. Un pourcentage de mortalité a été avancé, puis évalué à 20,7% ce qui est largement en-dessous de la réalité. Mais par ailleurs, dans les documents, il n'a pas été tenu compte des malades qui, nombreux, ont été abandonnés en route pour être répartis plus tard. Enfin, tous les Morisques expulsés du royaume de Grenade en 1571 n'ont pu, évidemment, être compris dans ce recensement. Bien que ça soit difficile, nous allons tenter de faire une estimation au départ de les explusions et non pas à l'arrivée des Marisques. Il est établi que lors de la déportation massive de novembre 1570, plus de 50 000 ont pris le chemin de la Castille. Mais,
avant eux, près de 20 000 avaient subi la même épreuve. C'est là un fait essentiel sur lequel les historiens n'ont pas été assez insistés.
Le chroniqueur Espagnole, Marmol Carvajal né en 1520 à Grenade et mort en 1600 dans la province de Malaga nous fourni des détails précieux sur ces expulsions partielles, celles qui touchent les habitants:
1- Albaicin de Grenade en Juin 1569: 4000 à 5 000 personnes
2- Vega de Grenade en Mars 1570, ici il parle de 5000 personnes
3- Tolox et Monda en Avril 1570: 2000 personnes pour chacune
4- Ronda en Mai, ?? aucun chiffre n'est donné
5- Guadix en Decembre, au moins 1500 personnes
6- Cuevas de Almanzora en février 1570
Au total on peut estimer à 20.000 personnes.
Une troisième vague d'expulsions eut lieu à partir de décembre 1570. Tout d'abord, quelques 3 500 Morisques furent acheminés avant la fin de l'année. Puis, en 1571, de nombreux Morisques qui s'étaient cachés dans un premier temps ou qui avaient été faits prisonniers furent à leur tour convoyés. Au bout du compte, peut-être 10 000 personnes sont venues grossir le nombre des déportés à partir de décembre 1570.
20 000, puis 50 000, 10 000 enfin, nous arrivons grosso modo au total de 80 000. Seuls, sans doute, 50 000 à 55 000 sont parvenus au bout du voyage. Mais le chiffre de 80 000 expulsés peut être retenu car il rend assez bien compte du fait qu'en dépit de la venue de 12 500 familles chrétiennes dans le Royaume de Grenade afin de le repeupler, 130 des 400 villages de celui-ci soient demeurés déserts.
Et puis l'heure fatale est arrivée en 1609, où l’opération de l'éradication totale qui commença au lendemain de la publication de l’édit d’expulsion des Morisques du Royaume de Valence, le 22 septembre 1609. la Reconquista ne s’était pas achevée en 1492 mais en 1609 !!! La décision d’expulser les Morisques fut prise au plus haut niveau de l’État le 4 avril 1609 pour des raisons religieuses et de sécurité, avec l’appui d’un secteur radical de l’Église et la collaboration, obtenue en échange de garanties financières, de la noblesse locale et des seigneurs de Morisques directement affectés par la mesure. L'aide fournie par les frères Barberousse, El Arouj et Kheir Eddine a permis de sauver pas moins de 70.000 et les transportés vers l'Algérie. Ici on parle des millions car en 1609 la France a vu débarqué sur ces côtes 150 000 Morisques. En 1610, une masse de 50.000 morisques arrivèrent vers la région du Languedoc. Parmis ces 150.000, seulement 30.000 ont quitté la France pour le Maghreb ou l'Italie.
Pour finir je vous envois vers les écrits de Jaime Bleda, ce religieux engagé fortement pour la cause des morisques et contre l'expulsion de 1609. Il nous a laissé un fort témoignage: "Ainsi, il est certain que des milliers de Morisques qui quittèrent ce Royaume de Valence, même pas le quart survécut. Nombreux périrent en mer noyés, jetés par-dessus bord par les patrons des bateaux qui les volaient. D'autres naufragèrent sans pouvoir atteindre les plages de la Berbérie. Les Arabes en tuèrent un nombre infini. La plupart moururent de faim, de soif, de froid et d'affliction après leur arrivée en Afrique, où ils se voyaient exilés d'un paradis terrestre dans les sables, la sécheresse et la chaleur ardente de ces contrées, et aux mains de cette gent si féroce, inhumaine et barbare. C'eût été encore mieux pour l'Espagne, si tous avaient péri"
Photos: Monument à la mémoire de l'expusion des andalous (Antaquera en Andalousie)



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