vendredi 1 août 2014

VOYAGE DANS LES ORIGINES DES NOMS DE FAMILLE
Le patronyme est un support de notre identité. C’est un héritage familial inaliénable. Il nous parvient du fond des âges comme une chaîne qui nous lie à un ancêtre. A cheval entre la science du langage et l’histoire, ce nom si familier à notre mémoire recèle parfois le code d’accès qui perce le secret d’énigmes séculaires. Bon nombre de noms de famille sont tirés de noms de lieux (toponymie). Il se trouve que tous les noms de lieux, de villes et village, de cours d’eau, de vallées et de montagnes portent des noms Amazighes à quelques rares exceptions. Parmi les synonymes de montagne en Amazighe, nous relèverons, par exemple, Amour qui va donner Ammouri, Amraoui. En comparant la carte d’Algérie avec celle de l’Espagne, on constate ce paradoxe : la toponymie espagnole est nettement plus arabisée que celle d’Algérie. Adrar qui va donner Drari.
Amour, un pic des Aurès, qui va donner Ammouri, Amraoui. Le Touat, par sa position stratégique sur la route du Soudan, a donné les Touati.
Oued Draâ, dans le sud-ouest a donné les Draï. Metidja a donné les Metidji. Tayebi désigne un originaire de Tayiba (la douce) qui est la cité de Médine, qualifiée ainsi par le Prophète (QSSSL). Aggoun, Laggoun, (ne pas confondre avec le muet en arabe) sont également des toponymes qui désignent un relief. (Plateau surélevé, plateforme dominante comme la Table de Jugurtha dans la zone est des Aurès.)
Le Qara-Bagh est une région du sud-ouest du Caucase. Elle donne les Karabaghli. Le suffixe « li» indique l’origine géographique.
Quant à la ville d’Izmir, elle a donné les Zemirli, Zemirline (Médéa, Tizi Ouzou, Alger Mostaganem). Kara signifie, le Noir. Entendons, le mat foncé. Ainsi, Karadeniz, c’est la mer Noire. Les habitants d’Albanie se nomment les Arouani. Fochtali vient de Phocée. Khorci transcrit de plusieurs façons, indique le Corse. L’île de Rodhes a donné Rodesli.
Djenoui vient de Gènova (Gênes). Venise se disait Ounis. Ses habitants se nomment Ounesli (Ounes = Venise et Li = originaire de…) Lounis et Ounissi. Il devient aussi El Ounès. Kherchi c’est le Crétois. Bouchnak, c’est le Bosniaque.
Les métiers traditionnels sont aussi à l'origine de plusieurs noms propres: éle cordonnier se dit papoudji qui se prononce baboudji et parfois, il se dit tout simplement babou. Debbagh, c’est le tanneur. Daouadji, le caravanier ou l’administrateur du caravansérail. Serkadji signifie le fabricant de vinaigre. Kateb et Racim, noms prédestinés, désignent l’écrivain et l’artiste des arts graphiques. Damardji s’occupe de la gestion de l’eau, donc Ouejdi Damardji est un habitant originaire de Ouejda qui assure la gestion de l'eau. Ghozzali (de ghozz) est un corps d’archers turkmènes venus à Tlemcen à l’appel de Youcef Ibn Tachfin pour renforcer la défense de la ville aux prises avec ses ennemis de l’Ouest. Dans son long poème consacré au tatoueur el ouchem, Ben El Messayeb évoque « bled er roum, bled el ghozz.». Kahouadji, cafetier. Mokdad, le guide. Saboundji, savonnier. Les divinités carthaginoises ont aussi laissé des monuments de traces dans les noms de famille : Amon se retrouve dans Hammou, Hammani. Baal se retrouve dans Baali, Bellil, Bali. La part de la faune et de la flore est tout aussi importante dans la formation des patronymes. Aflelou (papillon), Bahmane, désigne une racine médicinale aux propriétés stimulantes.
Enfin, certains trouvent des difficultés à situer l'origine de leur arbre généalogique car la fracture politique significative entre les dynasties au Maghreb et l'arrivée des vagues humaines originaires de la péninsule arabique (Béni Hilal et Banu Sulaym) allaient modifier durablement et structurellement les fondements sociopolitiques dans cette région. Et donc plusieurs familles vont se former à partir d’une fraction: Ayad (dépositaires des clés de La Kaâba) Abid, Arif, Ouled Zian, Ben Cherif, Benyagoub, Brahimi, Brahmia, ou Benbrahim, d’où sont issus les El Amri, Moqadem, Rezkallah, Saâdallah, Saâdani, Saâdi, Saïdani, Sakhri, Sellami, Selmi, Slaïmi...On retrouve dans Massinissa le radical maz qui peut laisser penser qu’il s’agirait à l’origine d’un nom proche de Mazghenni. Mazari, Mazi (Naït Mazi) Mazouna, Mazouni, Messis, Mezali, Mezghenna, Mezghich, Mzali, etc. Mais je reviendrai dans une prochaine publication sur le nom "Mazari".
Avec le second radical zagh, on liste les Benzaghou (Amazighe de Masmouda, actuellement ce nom est répandu à Tlemcen), Zerouali, Zeggar, Zaccari (djebel Zeccar), Zighi, Zeggaï, Izghen, Rezzag, Rezzoug, Bouzeghrane,Izghen, Sakrani, Segni, Zaâmoum, Zaccari (djebel Zeccar) Zaghbib, Zaghidour, Zaghloul Djaghloul dans le parler zénète), Zaghouane, Zaghrani, Zeggaï, Zeggar, Zeghbouche,Zeghni, Zerari,Zerouali, Zighi, Zouccal, etc. Les patronymes Amazighes ont conservé la nomination des origines tribales fondatrices répertoriées par Ibn Khaldoun : Arouaba,Sanhadja,Djazouli, Fetani, Ghoumari, Maghili …
Les nombreuses confréries religieuses et Zaouia ont été un facteur de cohésion sociale à des moments précis de l’histoire. C’est ainsi que l’Aïssaouiya, Ammariya, Kadiriya, ont donné Rahmani, Kadri, Lammari, …
Nous relevons parfois des noms énigmatiques comme le cas de Baouya. Il s’agit de deux initiales « El Ba Ouel Ya », autrement dit « B.Y. » qui pourrait être « Ben Yamina » ou Ben Yâagoub. Le mystère reste entier.
La liste n’est pas exhaustive. Jusqu’au bouleversement colonial, ces familles et ces clans ont vécu, des siècles durant, sous le mode de production pastoral et sont restés fidèles à une sensibilité littéraire très proche des classiques arabes des temps préislamiques que recèle la poésie bédouine, en particulier. En tout cas le débat reste ouvert.

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