vendredi 1 juillet 2016

LA SOIE, UN PRODUIT DE LUXE EN ANDALOUSIE
La production de la soie est une des grandes originalités de l'Espagne musulmane au Moyen Age dans l'Occident européen. Sa production repose sur la culture du mûrier et l'élevage du ver à soie. La sériciculture fut pratiquée d'abord en Chine, en Asie Centrale, sur les bords de la Caspienne et en Arménie. Au VIe siècle, le ver à soie est introduit subrepticement dans l'Empire byzantin, en Syrie du Nord: c'est l'histoire d'un moine d'Asie Centrale transportant la précieuse marchandise dans l'intérieur du roseau qui lui sert de bâton de voyage. En Espagne, le mûrier et l'élevage du ver à soie se sont implantés dans les parties abritées des vallées de la Sierra Nevada, là où se sont installées les tribus syriennes, lors de la grande immigration en 740. Les Syriens de Damas s'installèrent à Elvira dans la Vega de Grenade ; de Qinnasrîn (Syrie du Nord) à Jaén ; ceux de la région de Homs à Niebla, dans l'Ajarafe et à Seville. Ce sont eux qui introduisirent le ver à soie et les techniques de la soie en Andalousie.

Alméria était à l'époque des Almoravides, la ville d'Andalus où l'on trouvait alors les spécimens les plus remarquables de toutes les productions de l'artisanat. Elle possédait pour le tissage de la soie plus de huit cents métiers. Parmis les produits on peut citer, des rideaux à bandes verticales, des étoffes à damiers, des tapis de prière...Quant à Cordoue, «ville de grandes fortunes où le luxe se déploie de plusieurs façons par des étoffes et des vêtements précieux en lin souple ou en soie grossière et fine», son quartier des brodeurs et des tisserands demeurait célèbre. On y fabriquait des produits dont la qualité confectionnée pour les besoins de la Cour surpassait celle de l'Iraq. L'excellence des tissus de soie andalouse a inspiré à Ibn Al Khatib de Greande, la réflexion suivante: «Cette soie n'a de comparable que celle produite par l'Irak, encore que celle-ci soit moins fine, moins veloutée et moins solide». Les teinturiers de soie andalous étaient passés maître dans l'art de colorier «avec des herbes spéciales à al-Andalus».

La vente des mûriers était très réglementée. On pouvait vendre des mûriers dont une partie seulement était en feuilles, ou vendre le feuillage d'un mûrier encore sans feuille, de plus la soie entrait dans de nombreuses transactions, par exemple, un prêt de blé pouvait être remboursé en soie. Parmi les présents offerts par le souverain nasride Muhammad IV à Alphonse XI en 1333 figuraient des tissus d'or et de soie fabriqués à Grenade et que les monarques chrétiens appréciaient particulièrement. Dans les soieries grenadines prédominait la décoration en bandes parallèles, portant des inscriptions et des éléments géométriques qui s'était imposée à partir du XIIIe siècle (Il y a des photos disponibles sur le groupe, je vous invite à les consulter). Dans la Kaissariya, قيصرية de Grenade, la soie était confiée à des inspecteurs qui en vérifiaient le poids et la qualité, veillaient à la régularité de la vente aux enchères.

L'industrie de la soie faisait à l'époque musulmane la renommée de l'Andalousie, Par les ports d'Alméria et de Malaga, la soie filée était exportée vers l'Orient musulman, spécialement vers l'Egypte, «On en envoie même parfois jusqu'aux extrêmes limites du Khorassan (Iran) et ailleurs». Exportée de Malaga et d'Alméria vers Valence, grand marché de la soie, Cadix et Alicante, la soie était redistribuée en grande partie. «Des intermédiaires génois et valenciens procuraient aux catalans, à bon prix, la
soie d'Alméria en 1404. La soie de Grenade était vendue par les valenciens en 1402 aux compagnies de marchands de Lucques et de Florence qui la revendaient dans les Flandres, à Montpellier, à Bologne et même à Venise. en Italie c'est à Gênes que la soie était filée et tissée. La soie nasride concurrençait activement celle d'Orient». De Ceuta partaient des caravanes chargées de soie et de lin à destination du Maghreb. Les Morisques emporteront avec eux les secrets des techniques de sa fabrication, notamment à Tlemcen. Les artisans tisserands de la soie à Tlemcen se sont illustrés dans la beauté de la fabrication et la finesse de la confection des "Haik ou El K'ssa".

L'esthétique almohade de la fin du XIIe et du milieu du XIIIe siècle a inventé des motifs ornementaux floraux, géométriques et de caractères coufiques sur les tissus en soie. C'est l'époque où la manufacture des tissus musulmans atteint son apogée et se caractérise par la disparition de la décoration figurative, de tradition byzantine, dans laquelle abondent les animaux fantastiques. Ces vieilles formules orientales cèdent le pas à ces bandes parallèles sur lesquelles alternent ou se combinent, selon les cas, de belles arabesques, des motifs géométriques, des inscriptions de graphie coufique ou naskhi, النّقش.



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