Ma vidéo hebdomadaire sur la ville de Pise en Toscane et et l'art arabo-normand:
Nous avons déjà abordé l'histoire de la dynastie des Aghlabides, الأغالبة et la conquête de la Sicile Italienne. L'Émirat de Sicile était un État musulman établi sur l'île italienne entre 948 et 1091. Je vous invite à consulter les anciennes vidéos pour découvrir les merveilles de l'architecture arabo-normande de l'Italie. En Toscane, la ville de Pise est célèbre par sa tour penchée du XIIème siècle, haute de 55 mètres, qui commença à pencher immédiatement après sa construction. La place des Miracles (Piazza dei Miracoli) de Pise est classée au patrimoine de l'Unesco, elle rassemble le duomo (la cathédrale), la Tour penchée et le baptisère. Bien qu'elle soit loine de la Sicile, néanmoins un travail de restauration a permis de découvrir, en 1918, un chapiteau arabe placé sur une colonnette de la cathédrale de Pise dans la province de la Toscane. Le chapiteau, retiré de la position qu'il occupait dans le monument, fut placé au milieu de la vasque baptismale, au Baptistère, pour servir de base à la statue de saint Jean. L'inscription suivante était gravée sur le tailloir du chapiteau: عمل فتح النقّاش عبده, Travail de Fath le Naqqach, son serviteur, An-naqqach veut dire le sculpteur. Evidemment il s'agit d'un sculteur nommé Fath.
L'usage de graver des inscriptions, dans bien des cas assez longues, sur les quatre faces du tailloir d'un chapiteau, est une caractéristique de l'architecture musulmane de l'Espagne au IX et au Xème siècles. Si quelquefois l'inscription ne renferme que le nom seul de l'artiste, dans d'autres cas elle donne aussi le nom du souverain qui a ordonné le travail avec ses titres et le protocole complet et la date de l'ouvrage. Le plus ancien exemple connu, nous le retrouvons dans des chapiteaux d'El Madînat az-Zahrâ' de l'époque d'Abdel Rahmân III, postérieurement à l'année 950 (l'année de sa mort) suivent d'autres chapiteaux de l'époque de al-Hakam II, son fils. Etrangement, un des exemples du premier groupe porte la signature: Travail de Fath le Naqqach.
L'autre exemple est la mosquée de Cordoba qui nous a conservé plusieurs exemples de ce type d'inscriptions et ces signatures se trouvent non pas seulement sur des chapiteaux, mais aussi bien sur des colonnes et sur des bases. On peut citer par exemple: عمل فتح الرخّام, Travail de Fath ar-rakhâm, il s'agit du marbrier cette fois-ci Mais la signature de Fath an-naqqâch, nous la retrouvons sur un autre chapiteau de la mosquée de Cordoba.
Mais ce qui nous fascine comme le montre les photos attchées à ce commentaire, est avant tout, l'arborescence des colonnes et des arceaux en particulier à la croisée du transept, qui me rappelle la magnificence de grands édifices musulmans comme par exemple la grande mosquée de Cordoue, ce qui n'est finalement pas si étonnant pour un art qui sait si bien s’imprégner d'influences les plus diverses pour les réinterpréter pour le plus grand plaisir de l'amateur de cet art si foisonnant, et n'oublions pas que Pise, avec la conquête de la Sicile musulmane et aussi les croisades en Terre Sainte est à la proue des influences considérable qu'aura l'Islam pour l'Occident chrétien de cette époque.
Rappelons aussi que l'alcazar de Cordoba a conservé des chapiteaux avec des signatures de sculpteurs comme: عمل فتح الأيسر عبده , Travail de Fath al-Aîsar son serviteur mais il s'agit du "Guaucher". D'autres de la même période, jusqu'à un qui porte la date 361 H. (971-972 J-C), se trouvent au Bano del Albaicin de Grenade 6. Or, dans la même Grenade nous trouvons un chapiteau daté 363 H. avec la signature « travail de Fath ». On ne connais pas hors de l'Espagne du xe siècle des exemples de chapiteaux qui portent des inscriptions gravées sur le tailloir avec le nom et le protocole du souverain, la date et la signature du sculpteur. Déjà cela reconduirait le chapiteau de Pise dans le milieu espagnol du Xème siècle.
Alors comment ce chapiteau Espagnole s'est retrouvé à des milliers de kilomètres à Pise??!!
Il nous a été relativement facile de déterminer la date et le lieu d'exécution du chapiteau de la cathédrale de Pise: mais le problème devient plus compliqué si nous nous proposons d'expliquer quand et comment il a été transporté de l'Andalousie dans la ville italienne. On pourrait bien penser qu'il provient du butin de guerre en 1089 après la chute de Tolède : Almeria est le port de l'Andalousie où Fath a toujours travaillé, à El Madînat Zahrâ, à Cordoba, à Grenade, et probablement il y avait exécuté des travaux dont le seul document arrivé jusqu'à Pise serait le chapiteau émigré dans la cathédrale Toscane.
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