dimanche 4 janvier 2015

SE VOILER A TLEMCEN: UN ART DE FAIRE
Toutes les fois qu'elles quittent leur intérieur, les femmes de Tlemcen s'enveloppent (Y'lehfou) complètement avec El K'ssa. Sur ce Hayek ou K'ssa en soie, symbole de la virginité pour les célibataires (appelé aussi le voile de la virginité ou Hijab El Baqquriya, -البَكُّورِية مشتقّ من كلمة بِكْرُ- comme a été rapporté par certains rahalas) qu'un chroniqueur Français témoigne:
"...Le vendredi, la route du cimetière de Sidi Es-Sénoussi était pleine de femmes qui allaient prier sur les tombes. Scrupuleusement, enveloppée dans leurs draperies blanches comme dans toute l'Algérie, elles étaient encore plus religieusement voilées que les femmes d'Alger: celles-ci en effet, entre la pièce d'étoffe qui cache leur front et celle qui couvre leur figue, laissent voir le haut de leur nez, leurs sourcils et leurs yeux. Les femmes de Tlemcen ne portent qu'un seul voile qui tombe du haut de leur tête et dont elles serrent les bouts sur leur poitrine, en ménageant seulement dans les plis devant l'un de leurs yeux une ouverture triangulaire de 1 ou 2 centimètres. Je dois ajouter qu'elles ne s'enferment dans cette prison de laine que lorsqu'elles aperçoivent un homme sur la route."
"Tant qu'elles ne peuvent être vues, elles écartent les plis de ce suaire et marche à visage découvert. Tenez-vous à voir ces traits qu'on vous cache si jalousement? réglez votre marche de façon à dépasser ce groupe de femmes, vous aurez tout le temps de les voir et les examiner à votre aise avant que ces Agnès ne ramènent leur voile sur leur visage avec un petit geste de colombes effarouchées. Sans doute elles avaient parfaitement entendu le bruit de vos pas: elles auraient pu se voiler à temps mais on a beau être une bonne musulmane, on n'en est pas moins coquettes et élégantes."
"Il y a beaucoup de mauresque extrêmement jolies, je ne sais pas si on peut trouver une seule femme arabe de sang non mélangé. Groupées autour des tombes, ces femmes causent ensemble avec autant d'aisance que certaines dans un salon..."
Aujourd'hui on peut se demander sur ce qui reste de notre identité, notre obsession de l'imitation et du copiage nous a poussé à se débarasser de ce qui faisait jadis notre particularité, notre différence et notre fierté...Quel gâchis. On est complètement conscient que le centre de gravité de Tlemcen a connu et continu à connaître de multiples translations de toutes directions, mais ce n'est pas une raison. Un changement comportemental et moral dramatique et fort regrettable du tlemceni à pousser le Hayek à céder sa place à la Djellaba qui n'est pas Algérienne, c'est un vêtement venu d'alleurs. On ne peut énumérer les chroniqueurs, les poètes, les Rahalas qui ont décrit, chanté et admiré ce morceau de tissu si précieux et qui a marqué notre enfance. On l'oublie souvent, mais les hommes d'un certain âge de Tlemcen étaient aussi drapés d'un hayek blanc, ce qui signifie que la réputation du tissage et la confection du Hayek Tlemcenien était bel est bien unisexe.


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