mardi 26 août 2014

ORAN, LE 20 AOUT1531: LETTRE DE PEDRO DE GODOY (gouverneur intérimaire d’Oran) A L’ARCHEVÊQUE DE SANTIAGO (de l'ordre religieux militaire de Saint-Jacques de l'Épée en Espagne)
Voici ce qui se passe en ce moment dans le royaume de Tlemcen, et ce que je puis dire à Votre Seigneurie. Le roi et son fils se font la guerre. Moulay Abd-Allah a envoyé son Mezouar avec une partie de ses gens, contre le prince Mohammed. Il y a eu un combat, et l’avantage, dit-on, est resté à ce dernier; mais le kaïd des Beni-Rachid étant survenu avec 500 cavaliers, le fils du roi a dû se retirer. Tous les Arabes du royaume sont soulevés: les uns sont pour le roi, les autres pour son fils. Mois je crois que tous les cheikhs de cette partie du Levant se joindraient au prince Mohammed s’il se montrait de ce côté. Il conviendrait fort que la chose arrivât, parce que si le fils du roi devenait notre allié, nous tiendrions en main toutes les bonnes cartes du jeu, et Sa Majesté pourrait jouer la partie comme elle l’entendrait. Avec le prince Mohammed, nous aurions les Arabes, et le roi de Tlemcen, abandonné par eux, serait bien obligé de se soumettre. Mon avis est donc qu’il faut favoriser le fils et non le père. Pour ce qui regarde le Turc, tout ce que je puis dire à Votre Seigneurie, c’est que, si l’on est toujours dans l’intention de faire l’expédition d’Alger, il me parait indispensable de faire d’abord celle de Tlemcen. Celle expédition peut être promptement terminée, soit qu’on fasse la guerre ou qu’on négocie avec le roi et son fils. Il me semble que les choses pourraient s’arranger pacifiquement de la manière suivante : que Sa Majesté veuille bien favoriser le prince Mohammed et le reconnaître pour roi ; qu’elle lui donne une bonne part des terres que l’on prendra au Turc, et qu’en même temps, il ne soit porté aucun préjudice au roi de Tlemcen, c’est-à-dire qu’on laisse à ce dernier tous ses domaines. Je pense que, de cette manière, tous deux se montreront satisfaits et se joindront à nous pour faire la guerre à Barberousse; et le roi et son fils y allant, aucun Maure, Arabe ou Zenète, ne refusera de les suivre, parce que tous considèrent les Turcs comme leurs ennemis. Il ne se présentera jamais une meilleure occasion de mener à bonne fin ces deux affaires.
Le roi de Tlemcen a fait appeler un juif d’ici, et je crois que c’est dans l’intention d’entrer en négociation. Le juif est parti. Les Arabes, que Moulay Mohammed nous a envoyés, ont été un peu scandalisés en apprenant le départ de ce juif pour Tlemcen. J’ai fait de mon mieux pour les apaiser. Voilà ce qui arrive quand on entretient des intelligences avec les deux partis. Je puis certifier à Votre Seigneurie que la troupe qui tient ici garnison sert mieux que celle de bien d’autres frontières, et cependant cette troupe est la plus mal partagée. Si l’on pense toujours à faire de cette place d’Oran un lieu destiné à recueillir tous les gens de guerre de mauvaise vie qui se trouvent en Castille, il conviendrait qu’on leur assignât un quartier particulier, où ils seraient nourris et entretenus jusqu’au moment de les employer utilement ; autrement, on chassera d’ici le petit nombre de bons soldats qui nous restent. Don Alvaro de Bazan est arrivé à Mers-el-Kebir, le 13 de ce mois, avec onze galères et une fuste. En faisant route sur Risgol (Harchgoun, Rechgoun), il rencontra une fuste ennemie et lui donna la chasse; mais, comme les Turcs avaient sur lui une grande avance, ils ont eu le temps de se jeter à la côte et se sont sauvés. Toutefois, quinze Chrétiens esclaves, qu’ils avaient avec eux, ont pu s’enfuir.

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