L'HÉRITAGE ANDALOUS DANS L'HISTOIRE PÉRUVIENNE
La quête du mythique Eldorado a attiré au Pérou pays de l'Amérique latine une noria de conquistadors assoiffés de richesses et de pouvoir. Mais pas seulement, car on oublie que une immigration arabe au Pérou a commencé vers la deuxième moitié du XIXème siècle. Cependant en 1532, lors de la conquête espagnole, le pays reçoit la première vague d´arabes musulmans convertis au catholicisme et qui ont laissé une trace indélébile dans la culture péruvienne. Commençons par la vice-royauté du Pérou était l'un des deux principaux districts administratifs créé par la couronne de Castille dans ses possessions d'outre-mer, avec la Nouvelle-Espagne centrée sur le Mexique; Malgré les restrictions et les contrôles, l´alliance dynastique entre le Portugal et l´Espagne a permis, entre 1560 et 1640, l´entrée de juifs et de musulmans dans la Vice-royauté, sous couvert d´une
autre identitéÉ Nous n´avons pas beaucoup d´informations sur ces personnes, hormis un cas rapporté et certifié par le docteur Del Busto Duthurburu: Emir Cigala, qui vécut sous le nom de Gregorio Zapata, devint capitaine des armées royales, fit fortune à Potosi et c´est seulement quand il retourna chez lui qu´il révéla son identité, Emir Cigala, turc.
autre identitéÉ Nous n´avons pas beaucoup d´informations sur ces personnes, hormis un cas rapporté et certifié par le docteur Del Busto Duthurburu: Emir Cigala, qui vécut sous le nom de Gregorio Zapata, devint capitaine des armées royales, fit fortune à Potosi et c´est seulement quand il retourna chez lui qu´il révéla son identité, Emir Cigala, turc.
Mais il faut dire que la présence arabe non seulement dans la Vice-royauté mais aussi dans la Péninsule Ibérique est relativement réduite. Et afin de mesurer l´impact du monde arabe dans la Vice-royauté péruvienne, il est nécessaire de comprendre son influence à l´intérieur
de la Péninsule Ibérique, et pour cela la langue est un indicateur intéressant. Nous savons que l´espagnol vient du latin. A partir du Xème
siècle, le latin se divise en plusieurs langues vulgaires connues comme
langues romanes, d´où est issu l´espagnol. L´espagnol moderne, sur cette
base latine, reçoit le plus grand apport de termes empruntés directement
de l´arabe, soit plus de quatre mille. A titre de comparaison, la deuxième langue qui a influencé l´espagnol est la langue germanique introduite dans la Péninsule par les visigots et qui lui a apporté près de sept cents termes. Et si l´on compare les deux influences, la plupart des mots d'origine germanique sontdes patronymes et des toponymes,
des noms de personnes et de lieux, tandis que les mots d´origine arabe
proviennent de toute les manifestations humaines: les arts, les sciences, l'agriculture, le travail des mines, la navigation, l´astronomie, la philosophie, toutes les disciplines et toutes les expressions spirituelles
des peuples.
de la Péninsule Ibérique, et pour cela la langue est un indicateur intéressant. Nous savons que l´espagnol vient du latin. A partir du Xème
siècle, le latin se divise en plusieurs langues vulgaires connues comme
langues romanes, d´où est issu l´espagnol. L´espagnol moderne, sur cette
base latine, reçoit le plus grand apport de termes empruntés directement
de l´arabe, soit plus de quatre mille. A titre de comparaison, la deuxième langue qui a influencé l´espagnol est la langue germanique introduite dans la Péninsule par les visigots et qui lui a apporté près de sept cents termes. Et si l´on compare les deux influences, la plupart des mots d'origine germanique sontdes patronymes et des toponymes,
des noms de personnes et de lieux, tandis que les mots d´origine arabe
proviennent de toute les manifestations humaines: les arts, les sciences, l'agriculture, le travail des mines, la navigation, l´astronomie, la philosophie, toutes les disciplines et toutes les expressions spirituelles
des peuples.
Quelle est la cause de l´énorme impact du monde arabe dans la Péninsule Ibérique ? Ces dernières années, plusieurs recherches ont changé radicalement l´image que l´on pouvait avoir de l´Espagne, c´est à dire une nation spoliée par les arabes en 711 et des Espagnols qui luttent pendant huit siècles pour récupérer leur territoire perdu. Pour commencer, l'Espagne, en 711, n´existait pas. C´était un ensemble de royaumes fragmentés, divisés, en confrontation, conquis par une armée formée par des troupes de plusieurs groupes ethniques. On oublie aussi que Pendant Al-Andalous, il était normal que des princes chrétiens s´allient à des émirs musulmans pour combattre d´autres chrétiens ou bien que des émirs musulmans s´allient à des princes chrétiens pour combattre d´autres émirs musulmans. La frontière n´était donc pas religieuse. Deuxièmement, les recherches récentes démontrent que seulement la cinquième partie de la population musulmane qui habitait en Espagne au XIIème siècle était d'origine étrangère, des arabes ou des africains du Nord; le reste de cette population était constituée d´anciens chrétiens ou de descendants de ces
derniers, convertis à l´Islam dit El Mouwalladoune, المولّدون.
derniers, convertis à l´Islam dit El Mouwalladoune, المولّدون.
Les armées musulmanes conquérantes ne faisaient pas payer plus
d´impôts que les habituels aux habitants des territoires qu´ils occupaient. Ils leur permettaient aussi de conserver leur langue, leur culture, leurs lois et leurs autorités. Les vaincus devaient accepter deux conditions: reconnaitre la supériorité de l´Islam, c´est à dire la soumission, sans avoir besoin de se convertir, et deuxièmement, payer un impôt qui finançait l'expansion de l´Islam pour lui donner le territoire des croyants. La culture arabe était splendide si on la compare à l´Europe barbare du Moyen-âge, suite à l´énorme décadence culturelle qui suivit la chute de l´Empire romain. Ceci entraina une conversion en masse des chrétiens de la Péninsule Ibérique, d´abord par intérêt envers les classes dominantes et ensuite en raison de l´émerveillement produit par la culture musulmane.
d´impôts que les habituels aux habitants des territoires qu´ils occupaient. Ils leur permettaient aussi de conserver leur langue, leur culture, leurs lois et leurs autorités. Les vaincus devaient accepter deux conditions: reconnaitre la supériorité de l´Islam, c´est à dire la soumission, sans avoir besoin de se convertir, et deuxièmement, payer un impôt qui finançait l'expansion de l´Islam pour lui donner le territoire des croyants. La culture arabe était splendide si on la compare à l´Europe barbare du Moyen-âge, suite à l´énorme décadence culturelle qui suivit la chute de l´Empire romain. Ceci entraina une conversion en masse des chrétiens de la Péninsule Ibérique, d´abord par intérêt envers les classes dominantes et ensuite en raison de l´émerveillement produit par la culture musulmane.
Après la conquête du Nouveau Monde, James Lockartt est surpris
de voir que les musulmans ou les descendants de musulmans arrivent
en Amérique avec un statut très modeste. Dans quelles conditions arrivent
les autres morisques? Il s´agit surtout d´esclaves et il est intéressant
de noter la proportion homme/femme parmi cette population. Il y a deux sortes d´esclaves qui arrivent au Nouveau Monde. Premièrement,
ceux qui viennent de l´Afrique noire; dans ce cas nous trouvons une
femme pour deux ou trois hommes car ce qui intéresse ici c´est la force
physique d´ouvriers non qualifiés pour les travaux durs. Deuxièmement,
les esclaves morisques, et ici la proportion est inverse: pour chaque homme arrivent quatre ou cinq femmes. Pourquoi cette différence? Parce
que, parmi les esclaves morisques, les hommes sont des artisans spécialisés. D´ailleurs, les termes «albañil» [maçon] et «alarife» [maître d'oeuvre] sont arabes. Ces artisans, ouvriers et maîtres d´oeuvre morisques vont imprégner l´art dans la culture hispano-américaine,
mais qu´en est-il avec les femmes ? Pourquoi cette énorme proportion de femmes ? On va employer les termes de Lockartt et supposer que quand un espagnol arrive avec une «esclave noire», il l´amène en tant que compagne sexuelle, mais quand il arrive avec une esclave morisque, il s'agit sans aucun doute de sa concubine. La plupart des femmes qui arrivent en Amérique viennent en qualité d´esclaves et ont une double fonction: gouvernante et concubine A leur arrivée leur situation est
modeste, mais l’importance qu´elles vont avoir au sein de la Viceroyauté
va dépendre largement de la fortune du compagnon dont elles
dépendent.
de voir que les musulmans ou les descendants de musulmans arrivent
en Amérique avec un statut très modeste. Dans quelles conditions arrivent
les autres morisques? Il s´agit surtout d´esclaves et il est intéressant
de noter la proportion homme/femme parmi cette population. Il y a deux sortes d´esclaves qui arrivent au Nouveau Monde. Premièrement,
ceux qui viennent de l´Afrique noire; dans ce cas nous trouvons une
femme pour deux ou trois hommes car ce qui intéresse ici c´est la force
physique d´ouvriers non qualifiés pour les travaux durs. Deuxièmement,
les esclaves morisques, et ici la proportion est inverse: pour chaque homme arrivent quatre ou cinq femmes. Pourquoi cette différence? Parce
que, parmi les esclaves morisques, les hommes sont des artisans spécialisés. D´ailleurs, les termes «albañil» [maçon] et «alarife» [maître d'oeuvre] sont arabes. Ces artisans, ouvriers et maîtres d´oeuvre morisques vont imprégner l´art dans la culture hispano-américaine,
mais qu´en est-il avec les femmes ? Pourquoi cette énorme proportion de femmes ? On va employer les termes de Lockartt et supposer que quand un espagnol arrive avec une «esclave noire», il l´amène en tant que compagne sexuelle, mais quand il arrive avec une esclave morisque, il s'agit sans aucun doute de sa concubine. La plupart des femmes qui arrivent en Amérique viennent en qualité d´esclaves et ont une double fonction: gouvernante et concubine A leur arrivée leur situation est
modeste, mais l’importance qu´elles vont avoir au sein de la Viceroyauté
va dépendre largement de la fortune du compagnon dont elles
dépendent.
A la différence de la population indigène, les femmes morisques de la deuxième génération vont s´assimiler et devenir des espagnoles de plein droit. Leur présence, si nous regardons la situation de nos jours, peut encore s´apprécier en Amérique et au Pérou, dans les régions où les groupes aristocratiques ont plutôt été endogamiques. Je pense, par exemple, à la ville de Trujillo, où les traits morisques sont toujours caractéristiques. Donc, à la différence des femmes
indigènes, cet héritage arabe va s´étendre à l´ensemble de la société
de la Vice-royauté, à partir de cette assimilation des esclaves morisques
converties, Cette forte présence, bien qu´elle soit toujours niée, enrichit énormément le patrimoine culturel et fait du Pérou un pays où tous les
sangs et toutes les patries se mêlent, à une échelle que nous commençons tout juste à connaître.
indigènes, cet héritage arabe va s´étendre à l´ensemble de la société
de la Vice-royauté, à partir de cette assimilation des esclaves morisques
converties, Cette forte présence, bien qu´elle soit toujours niée, enrichit énormément le patrimoine culturel et fait du Pérou un pays où tous les
sangs et toutes les patries se mêlent, à une échelle que nous commençons tout juste à connaître.
![L'HÉRITAGE ANDALOUS DANS L'HISTOIRE PÉRUVIENNE
La quête du mythique Eldorado a attiré au Pérou pays de l'Amérique latine une noria de conquistadors assoiffés de richesses et de pouvoir. Mais pas seulement, car on oublie que une immigration arabe au Pérou a commencé vers la deuxième moitié du XIXème siècle. Cependant en 1532, lors de la conquête espagnole, le pays reçoit la première vague d´arabes musulmans convertis au catholicisme et qui ont laissé une trace indélébile dans la culture péruvienne. Commençons par la vice-royauté du Pérou était l'un des deux principaux districts administratifs créé par la couronne de Castille dans ses possessions d'outre-mer, avec la Nouvelle-Espagne centrée sur le Mexique; Malgré les restrictions et les contrôles, l´alliance dynastique entre le Portugal et l´Espagne a permis, entre 1560 et 1640, l´entrée de juifs et de musulmans dans la Vice-royauté, sous couvert d´une
autre identitéÉ Nous n´avons pas beaucoup d´informations sur ces personnes, hormis un cas rapporté et certifié par le docteur Del Busto Duthurburu: Emir Cigala, qui vécut sous le nom de Gregorio Zapata, devint capitaine des armées royales, fit fortune à Potosi et c´est seulement quand il retourna chez lui qu´il révéla son identité, Emir Cigala, turc.
Mais il faut dire que la présence arabe non seulement dans la Vice-royauté mais aussi dans la Péninsule Ibérique est relativement réduite. Et afin de mesurer l´impact du monde arabe dans la Vice-royauté péruvienne, il est nécessaire de comprendre son influence à l´intérieur
de la Péninsule Ibérique, et pour cela la langue est un indicateur intéressant. Nous savons que l´espagnol vient du latin. A partir du Xème
siècle, le latin se divise en plusieurs langues vulgaires connues comme
langues romanes, d´où est issu l´espagnol. L´espagnol moderne, sur cette
base latine, reçoit le plus grand apport de termes empruntés directement
de l´arabe, soit plus de quatre mille. A titre de comparaison, la deuxième langue qui a influencé l´espagnol est la langue germanique introduite dans la Péninsule par les visigots et qui lui a apporté près de sept cents termes. Et si l´on compare les deux influences, la plupart des mots d'origine germanique sontdes patronymes et des toponymes,
des noms de personnes et de lieux, tandis que les mots d´origine arabe
proviennent de toute les manifestations humaines: les arts, les sciences, l'agriculture, le travail des mines, la navigation, l´astronomie, la philosophie, toutes les disciplines et toutes les expressions spirituelles
des peuples.
Quelle est la cause de l´énorme impact du monde arabe dans la Péninsule Ibérique ? Ces dernières années, plusieurs recherches ont changé radicalement l´image que l´on pouvait avoir de l´Espagne, c´est à dire une nation spoliée par les arabes en 711 et des Espagnols qui luttent pendant huit siècles pour récupérer leur territoire perdu. Pour commencer, l'Espagne, en 711, n´existait pas. C´était un ensemble de royaumes fragmentés, divisés, en confrontation, conquis par une armée formée par des troupes de plusieurs groupes ethniques. On oublie aussi que Pendant Al-Andalous, il était normal que des princes chrétiens s´allient à des émirs musulmans pour combattre d´autres chrétiens ou bien que des émirs musulmans s´allient à des princes chrétiens pour combattre d´autres émirs musulmans. La frontière n´était donc pas religieuse. Deuxièmement, les recherches récentes démontrent que seulement la cinquième partie de la population musulmane qui habitait en Espagne au XIIème siècle était d'origine étrangère, des arabes ou des africains du Nord; le reste de cette population était constituée d´anciens chrétiens ou de descendants de ces
derniers, convertis à l´Islam dit El Mouwalladoune, المولّدون.
Les armées musulmanes conquérantes ne faisaient pas payer plus
d´impôts que les habituels aux habitants des territoires qu´ils occupaient. Ils leur permettaient aussi de conserver leur langue, leur culture, leurs lois et leurs autorités. Les vaincus devaient accepter deux conditions: reconnaitre la supériorité de l´Islam, c´est à dire la soumission, sans avoir besoin de se convertir, et deuxièmement, payer un impôt qui finançait l'expansion de l´Islam pour lui donner le territoire des croyants. La culture arabe était splendide si on la compare à l´Europe barbare du Moyen-âge, suite à l´énorme décadence culturelle qui suivit la chute de l´Empire romain. Ceci entraina une conversion en masse des chrétiens de la Péninsule Ibérique, d´abord par intérêt envers les classes dominantes et ensuite en raison de l´émerveillement produit par la culture musulmane.
Après la conquête du Nouveau Monde, James Lockartt est surpris
de voir que les musulmans ou les descendants de musulmans arrivent
en Amérique avec un statut très modeste. Dans quelles conditions arrivent
les autres morisques? Il s´agit surtout d´esclaves et il est intéressant
de noter la proportion homme/femme parmi cette population. Il y a deux sortes d´esclaves qui arrivent au Nouveau Monde. Premièrement,
ceux qui viennent de l´Afrique noire; dans ce cas nous trouvons une
femme pour deux ou trois hommes car ce qui intéresse ici c´est la force
physique d´ouvriers non qualifiés pour les travaux durs. Deuxièmement,
les esclaves morisques, et ici la proportion est inverse: pour chaque homme arrivent quatre ou cinq femmes. Pourquoi cette différence? Parce
que, parmi les esclaves morisques, les hommes sont des artisans spécialisés. D´ailleurs, les termes «albañil» [maçon] et «alarife» [maître d'oeuvre] sont arabes. Ces artisans, ouvriers et maîtres d´oeuvre morisques vont imprégner l´art dans la culture hispano-américaine,
mais qu´en est-il avec les femmes ? Pourquoi cette énorme proportion de femmes ? On va employer les termes de Lockartt et supposer que quand un espagnol arrive avec une «esclave noire», il l´amène en tant que compagne sexuelle, mais quand il arrive avec une esclave morisque, il s'agit sans aucun doute de sa concubine. La plupart des femmes qui arrivent en Amérique viennent en qualité d´esclaves et ont une double fonction: gouvernante et concubine A leur arrivée leur situation est
modeste, mais l’importance qu´elles vont avoir au sein de la Viceroyauté
va dépendre largement de la fortune du compagnon dont elles
dépendent.
A la différence de la population indigène, les femmes morisques de la deuxième génération vont s´assimiler et devenir des espagnoles de plein droit. Leur présence, si nous regardons la situation de nos jours, peut encore s´apprécier en Amérique et au Pérou, dans les régions où les groupes aristocratiques ont plutôt été endogamiques. Je pense, par exemple, à la ville de Trujillo, où les traits morisques sont toujours caractéristiques. Donc, à la différence des femmes
indigènes, cet héritage arabe va s´étendre à l´ensemble de la société
de la Vice-royauté, à partir de cette assimilation des esclaves morisques
converties, Cette forte présence, bien qu´elle soit toujours niée, enrichit énormément le patrimoine culturel et fait du Pérou un pays où tous les
sangs et toutes les patries se mêlent, à une échelle que nous commençons tout juste à connaître.](https://scontent-a-lga.xx.fbcdn.net/hphotos-xpf1/t1.0-9/s526x395/10360609_10204292045124183_5618318765634112701_n.jpg)
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